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  • 31/01/2024 à 11:24

Ce monde est ce que nous en faisons

Ce monde est ce que nous en faisons

Par Mansour M’henni

Ces derniers jours, à l’occasion de la Coupe d’Afrique des Nations en Côte d’Ivoire, et en marge du conflit entre Israël et la Palestine occupée, plusieurs attitudes et de nombreux commentaires, partagés sur les réseaux sociaux et ailleurs, nous semblent devoir être commentés dans la perspective d’un monde que nous revendiquons et que nous desservons peut-être par nos réactions spontanées qui ne font qu’attiser l’esprit de conflit, de haine et d’effritement même de la notion d’humanité.

Avant le match du Maroc contre l’Afrique du Sud, les divergences quant à l’équipe à soutenir se sont multipliées et c’est dans l’ordre des choses du point de vue strictement sportif : on apprécierait mieux le jeu d’une équipe plutôt que celui de l’autre, soit sur le plan tactique soit sur le plan de la technique individuelle. On penche aussi pour une équipe ou pour une autre par simple subjectivité, de par une affection liée au mythe personnel de chacun. Cependant, il me paraît peu raisonnable de s’inscrire dans un dépit haineux (il l’est forcément, à un niveau ou à un autre) contre un pays ou un peuple, et d’en faire la propagande, rien que parce que le pouvoir en place dans ce pays a pris des positions géostratégiques sur lesquelles nous ne sommes pas d’accord. Cette situation a été perçue au début de la compétition en rapport aux équipes d’Algérie et du Maroc ; elle est réapparue le 30 janvier en rapport aux équipes du Maroc et de l’Afrique du Sud.

Une vraie confusion me semble régner sur l’état d’esprit, non seulement populaire mais élitiste aussi, qui entremêlent le sport en tant qu’école du vivre-ensemble et la guerre en tant qu’ennemie de cette valeur. Il y a dans tous les pays que nous prenons pour ennemis, des gens plus proches de nous, dans une éthique qui rehausse l’humanité, jusqu’à s’opposer fermement aux dirigeants de leurs pays. Qu’on se rappelle certaines positions de soutien à Farhat Hached venant de responsables français dans la période coloniale ! Mais on peut multiplier les exemples pour montrer qu’il y a de l’humanité et de l’humanisme surtout, partout dans le monde, au-delà, contre parfois, les corps de gouvernance.

Comment choisir d’aimer l’Afrique du Sud contre le Maroc, celui-ci étant un frère éternel dans la maghrébinité ? Pourquoi ne pas aimer l’Afrique du Sud ET le Maroc, en assumant des choix footballistiques délestés de toute haine et de toute animosité ?

Certes, la guerre à Gaza est cruelle et quelle que soit notre position à l’égard des formations politiques impliquées dans le conflit, on ne peut qu’être solidaire du peuple palestinien dans sa lutte pour son indépendance et pour l’intégrité de son territoire sur lequel il peut exercer son droit à la dignité, à la liberté et au bien-être. On ne peut que condamner la quasi dissémination de ce peuple et la violence sauvagement meurtrière exercée sur ses femmes, ses enfants et ses personnes âgées. Mais est-ce une raison pour s’inscrire dans une sorte d’éducation à la haine entre les peuples, un peu partout dans le monde ? Savons-nous qu’en le faisant, nous ne pouvant que susciter un surplus de haine, en réponse. Ainsi au lieu de militer pour un monde plus humain, on ne fait que contribuer à la pérennisation du modèle d’un monde inhumain.

A ce propos, en guise de conclusion, une citation de Gandhi m’interpelle ; je la partage à toutes fins utiles : « Ce monde est ce que nous en avons fait. S'il est sans pitié aujourd'hui, c'est parce que nous l'avons rendu impitoyable par nos comportements. Nous ne pouvons changer le monde que si nous changeons nous-même, et cela commence par notre langage et notre façon de communiquer. »

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