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  • 30/07/2024 à 10:10

« res publica », « politeía » ou « démokratia »

« res publica », « politeía » ou « démokratia »

Par Mansour M’henni

Comme cela m'arrive de plus en plus, j'ai laissé quelques jours avant d'écrire cette Chronique dont l'objet pourrait se lire en rapport à la célébration de l'anniversaire de la République tunisienne, le 67ième anniversaire qui coïncide avec le dynamique prélude des élections présidentielles fixées au 6 octobre 2024.

Il était un temps où les fêtes nationales étaient célébrées en grand tapage qui se lisait comme un enthousiasme patriotique, comme une hypocrisie politique ou comme un défoulement pur et simple compensant des frustrations difficilement et douloureusement contenues. Mais depuis un certain 14 janvier 2011, on se dispute la légitimité ou la félonie des symboliques attribuées à ces "dates-amers" (amères, pour certains !?). On polémique sur l'intérêt ou la naïveté du tapage carnavalesque monté comme un cortège d'accompagnement de l'histoire. On en arrive même, par abus des extrêmes, à marquer les lignes de séparation idéologique par des traits couleur de sang et de drapeau, comme pour emmêler le crime et le martyr. Il semble en être ainsi pour la fête de la République, cette année comme il y a un peu plus d'une décennie.

Mais au-delà de tout le manège qui tourne autour du concept de « République », il y a peut-être un besoin de repenser ce concept en fonction de ses origines et de ses objectifs. La langue française, comme de coutume, dans la tradition postaristotélicienne, tient droit du latin et cela se justifie d’autant plus que le mot remonte à la naissance de la République romaine à la fin du sixième siècle avant Jésus-Christ (-509), donc avant que Platon, au premier tiers du quatrième siècle Av. J.C., ne rédige, en Grec ancien, sa Πολιτεία / politeía, traduite par « République ». Pourtant, « En grec, la "république" se dit "démokratia" ("δημοκρατια") et le mot désigant le gouvernement en général est le "politéia" ». Ces données sont accessibles pour tous mais les rappeler inviterait peut-être à repenser, pour nous, aujourd’hui au moins, aussi logiquement que possible, les différents croisements mais aussi les distinctions idoines entre la république et la démocratie.

Je n’ai aucune prétention à faire l’enseignant à ce propos, car je pense y avoir plus à apprendre qu’à renseigner (et encore moins à enseigner). C’est d’ailleurs une attitude qui me semble venir de mon penchant pour la démocratie. Mais attirer l’attention de tous les concernés, les philosophes et enseignants de la philosophie d’abord, avec l’humilité dont ils seraient redevables, et également le commun des citoyens aux formations diverses et aux contributions utiles exprimant les besoins d’une majorité considérée comme déterminante de l’état (et l’État) de démocratie. N’est-ce pas cette idée que défendrait le principe de la « philosophie pour tous » ?

En définitive, comment repenser la Cité aujourd’hui, dans son sens grec ancien mais dans son élan de modernisation et d’actualité. Quelle articulation heureuse et fructueuse trouverait-on entre la « chose publique » (res publica) et l’Etat ? Dans l’opposition de la République à l’autocratie, à la monarchie et à l’oligarchie, une opposition qu’elle revendique au nom de ce qui est devenu son synonyme ou presque, autrement dit la démocratie, comment comprendre, hier et sans doute aujourd’hui aussi, que la démocratie autorise, dans des situations délicates, un certain autoritarisme qui n’a rien à envier à la monarchie ou à l’autocratie ?

De nombreuses questions se posent sur notre voie vers la démocratisation, à supposer que celle-ci soit vraiment notre idéal et notre objectif ! Pensons-y, dans les règles de la pensée démocratique ! Mais au fait, quelles sont ces règles ?

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