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  • 28/02/2015 à 18:30

Alors cette robe, noire et bleue ou blanche et or ? Ce que dit la science...

Alors cette robe, noire et bleue ou blanche et or ? Ce que dit la science...
Un appel à l'aide, celui d'une jeune femme, baptisée « Swiked » sur Tumbrl, en désaccord avec ses amis sur la couleur d'une simple robe à rayures bleue et noire, apparaissant dans une photo a soulevé un tsunami de réactions.
La femme poste la photo, innocemment, et demande leur avis aux internautes. Trois jours plus tard, cette robe diabolique a déjà ensorcelé plusieurs dizaines de millions d'internautes.

Selon Buzfeed, qui a consulté ces 25 millions de lecteurs, 72% des internautes la voient blanche et dorée, et 28% jurent qu'elle est bleue et noire. Mais ça va plus loin ! L'auteur de cet article la voit bleue et noire, puis jaune et blanche, par alternance – ce qui lui permet d'ailleurs d'écrire en toute neutralité.
Que la robe en elle-même soit bleue et noire  - comment en attestent les autres photos de ce modèle sur la Toile, ainsi que les différents tests Photoshops réalisés par les internautes - importe peu. la vraie question, c'est : pourquoi la voyons nous différemment?

Tout se passe dans le cerveau

Alors docteur, que se passe-t-il ? Ca vient de la robe ? De la photo ? Des nos yeux ? Aucun des trois ! Tout se passe là haut, quelque part entre nos deux oreilles. « La couleur est le fruit d'un ménage à trois – l'objet, la lumière et l'observateur - qui naît dans le cerveau de ce dernier », rappelle ainsi Emmanuel Fritsch, spécialiste de l'origine des couleurs à l'Institut des matériaux de Nantes.

Ainsi, deux êtres humains ne voient presque jamais strictement la même chose, comme l'explique la professeur Françoise Viénot, chercheuse au Muséum national d'histoire naturelle et spécialiste des couleurs et effets visuels  : « Dans le système visuel, le cerveau recode, recalcule, transforme, recombine les informations en provenance de la rétine pour aboutir et reconstruire une information relative au matériau dont est fait l'objet, explique-t-elle. Dans cette recombinaison, l'information est remaniée, éventuellement faussée, et il est vraisemblable que chacun obtient des résultats différents. » D'accord pour le fonctionnement général, mais comment se fait-il que cette photo particulière soit si clivante ?

La clé, c'est la lumière

Pour comprendre ce qui peut dérouter deux cerveaux différents, il faut d'abord chercher du côté de l'environnement de la cible, c'est à dire, l'influence qu'a le reste de la photo sur notre perception de la robe.

On parle des objets et couleurs situés dans le voisinage immédiat, autant d'éléments qui peuvent créer, par exemple, une atmosphère générale et un phénomène de contraste : si vous dessinez deux point bleus clairs, l'un sur un fond blanc, l'autre sur un fond bleu foncé, le second point va paraître bien plus pâle par rapport au premier. Selon que votre cerveau se focalise sur la cible ou synthétise la luminosité émanant de la totalité de la photo, le résultat est différent. Ici, la robe prenant la quasi-totalité de la photo, l'environnement «matériel» n'est sans doute pas déterminant.

Mais l'élément le plus influent de cet environnement, dans ce cas précis, c'est l'éclairage de la robe elle-même, sur la photo. Ou plutôt la façon dont chacun d'entre nous perçoit cet éclairage. Selon la théorie de la «constance de la couleur», le cerveau et l'oeil coopèrent pour permettre aux humains de voir une couleur « constante », quelles que soient les conditions d'éclairage. Si on résume : la rétine capte une information A, la couleur de la robe, et une information B – la façon dont la robe est éclairée. Le cortex s'arrange lui pour que, quelle que soit l'information B, l'information A soit perçue pareillement pour l'observateur. Ce mécanisme induit donc de trouver des interprétations en permanence aux sources d'éclairage identifiables, que ce soit la luminosité ambiante, ou encore la présence de reflets.

Ainsi donc, on voit tous la même robe. Mais celui qui juge que cette photo de la robe est surexposée va se dire : «en vrai, elle doit être plus sombre». Il va donc inconsciemment corriger ce trop-plein de lumière, minimiser la nuance «jaune» pour voire la robe telle qu'il la pense être en réalité : bleue et noire. Celui qui estime à l'inverse que la robe n'est pas vraiment mise en lumière, voire dans l'ombre, aura tendance à se dire que la «vraie robe» doit forcément être plus claire et éclatante : il va ignorer la teinte «bleue» et voire l'autre version, en blanc et or.
La Parisien
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