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  • 23/01/2019 à 11:08

De l’obligation d’éviter l’année blanche !

De l’obligation d’éviter l’année blanche !

Par Mansour M’henni

Le conflit de plus en plus cuisant, opposant le syndicat de l’enseignement moyen et secondaire au ministère de l’Education, semble conduire inéluctablement à l’année blanche, provoquant ainsi le mécontentement des élèves et de leurs parents, descendus en masse, eux aussi comme on l’a vu dernièrement à Gabès, pour condamner l’attitude, jugée irresponsable, des deux parties en divergence.

Disons-le franchement, la crise, dite professionnelle ou sociale et poussée ces derniers temps au plus fort de sa tension, n’est pas sans lien évident avec la crise politique marquant la fin de 2018 et le début de 2019, sur un fond de crise du pouvoir et d’affaiblissement de l’Etat, dans la mouvance d’une combinatoire pré-électorale, cyniquement conduite par les acteurs politiques, non sans connivence avec les organisations professionnelles et certaines formations de la société civile. Or, on le sait, dans la rhétorique politique, les uns comme les autres ont assez d’arguments, tous coulés dans les mots les plus à même de toucher les sentiments des citoyens et d’agir sur leurs penchants et leurs opinions, pour se justifier de vérités et de raisons présentées comme inaliénables et presque indiscutables, nonobstant le masque des négociations répétées et toujours peu concluantes. D’ailleurs, dans le vertige général où se perdent les repères du pouvoir effectif dans le pays, on nous parle de plus en plus d’intentions flagrantes, chez certains, de (faire) conduire les élections de 2019 par l’interposition et les moyens de pression de l’UGTT. Ce qui est manifestement au centre de ce jeu dangereux, à enjeux divers et multiples, et au-delà du rôle de comparses que jouent certaines figures et formations politiques, c’est le flagrant bras de fer entre les deux têtes de l’exécutif tunisien, sur fond de crise de leur parti d’origine, Nidaa Tounès, en rapport d’un côté à sa progéniture plus ou moins légitime, de l’autre à Ennahdha, l’allié de chacun, selon les circonstances et selon ses propres intérêts savamment mis en contexte, machiavéliquement considérés et malicieusement gérés.

De ce point de vue, la crise de l’enseignement moyen  et secondaire est un autre bras de fer qui n’est ni étranger au premier, ni de nature différentes. C’est pourquoi, il est peu certain qu’il arrive à dénouement avant la mise au clair des plans d’avenir pour les prochaines échéances électorales. D’ailleurs, la crise de la fonction politique relève aussi de la même logique et des mêmes tiraillements et tractations. Ce qui est évident donc, c’est que nos acteurs politiques, tous genres confondus, ne discutent pas vraiment. Chacun est rigidement installé dans ses visions et ses visées inamovibles, sourdement à l’écoute du ronronnement de l’autre, pour mieux narguer l’opinion publique.

Comment ne pas craindre alors l’année blanche qui semble s’abattre sur les citoyens comme un rapace, pour leur déroute et leur malheur ? De fait, quand les intentions sont bonnes ou quand l’Etat a les moyens de son pouvoir, une année blanche n’est jamais une fatalité. Je reviens d’un pays d’Afrique où l’université est en train de boucler, fin janvier de 2019, l’année universitaire 2017-2018 encombrée par une crise de l’enseignement pareille à la nôtre. Tout le monde est mobilisé, même pendant les vacances, pour ne pas faire porter au pays et à la société le sceau de la honte que constituerait une année blanche.

Le pire, chez nous, au vu des signes précurseurs, c’est non seulement de ne pas savoir, ou vouloir, éviter l’année blanche, mais de voir son esprit et ses motivations s’étendre et se généraliser à tous les secteurs. Il ne nous resterait alors qu’à perdre notre symbolique du blanc comme un signe de pureté, de netteté et de propreté, pour retrouver ce blanc qui, sous d’autres cieux, est la couleur de la mort, du deuil et du malheur.

Si cela arrivait, la responsabilité n’en incomberait pas aux politiques seulement, mais d’abord et surtout à l’inconscience et à la léthargie citoyenne.

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