Djerba… après le Sommet !

Par Mansour M’henni

Voilà que se sont achevés les travaux du 18° Sommet de la Francophonie à Djerba ! Et le voilà ce sommet entrer petit à petit dans l’Histoire, avec ses ombres et ses lumières, mais avec les signes évidents d’une réconfortante gloire, voire d’une heureuse victoire !

En effet, le monde francophone a pu confirmer sa structure et son allure dans le sens et l’esprit que l’évolution lui a imposés, totalement détournés de l’histoire coloniale et de ses déboires, tout dirigés vers l’avenir et ses espoirs, ceux d’un monde fédéré et solidaire. Il y a certes du chemin à faire encore pour parfaire cette image et pour atteindre les objectifs escomptés ; mais l’intention et la volonté y sont, confortées par une intelligence interactive qui fait de la francophonie quelque chose de plus grand et de plus ambitieux que la langue française, autrement dit une nouvelle culture et une autre philosophie du vivre-ensemble.

Par ailleurs, le sommet s’est inscrit comme un événement d’importance dans le temps politique et social de la Tunisie en général et de Djerba en particulier.

Dans le pays, il faut bien reconnaître que, pour la plupart des Tunisiens, l’organisation de ce sommet laisse un vrai sentiment de fierté et de satisfaction quant aux signes précurseurs d’un retour de la Tunisie à la seule diplomatie qui lui convienne, celle de son initiateur Habib Bourguiba, l’un des pères fondateurs de la « Nouvelle Francophonie ». Les uns le disent pour creuser davantage leur opposition à Kaïs Saïed qui a commis, encore une fois, la méprise d’omettre l’évocation du nom du Président initiateur de la Tunisie moderne et indépendante. Les autres le pensent et le sentent dans leur être citoyen, en dehors de toute arrière-pensée idéologique à tendance conflictuelle.

N’empêche que le succès de ce sommet, conforté par une satisfaisante prestation de la Tunisie dans son premier match en Coupe du monde, à Qatar, donnerait à Kaïs Saïed et aux siens certaines facilités à avancer dans l’exécution de son plan politique jugé salvateur pour certains et désastreux pour les autres. Ainsi, au-delà des oppositions et des réserves politiques et civiles, la Tunisie semble aller vers un nouveau parlement à la juste mesure de la circonstance imposée et tout prêt à servir les orientations arrêtées. Quant à ce qui en découlera, l’avenir seul le dira.

Mais au-delà ou en-deçà de ces combats, il y a Djerba qui a donné la preuve, à l’occasion du sommet, qu’elle est bien l’île qui « condense dans son histoire toute l’histoire de la Méditerranée ». Elle serait cette microstructure donnant l’exemple éloquent d’une clôture illusoire, celle de l’insularité, toute représentative en fait d’une ouverture plurielle, offerte de tous côtés, à tout abord, pour un vivre-ensemble d’échange, de conversation, de coopération, de solidarité et de respect réciproque. Ainsi perçue, Djerba devient une invitation permanente à revivre cet état d’esprit pour mieux le concrétiser dans la pratique quotidienne et pour lui donner une portée universelle. Elle est ainsi cette cellule qui peut renvoyer l’image à cultiver d’un monde nouveau et d’une nouvelle humanité, à quelque échelle qu’on veuille la concevoir.

Aussi est-il de juste reconnaissance et d’honnête récompense de doter cette île, d’édifiante histoire et d’ambitieux espoir, d’une stratégie et d’une politique d’entretien et de dynamisation socioéconomique et culturelle pour en faire un lieu de pèlerinage moderne, non aligné sur une idéologie ni une religion, mais ouvert à toutes les idéologies et à toutes les religions, dans les égards dus à tous pour tous. Pour ce faire, il faut lui concevoir des activités culturelles et touristiques saisonnières et encourager la société civile, le tissu associatif surtout, à y travailler. Quant à l’Etat, il lui revient d’initier, à Djerba, une rencontre annuelle à la mesure des investissements en logistique qui y ont été réalisés. Une rencontre qui fêterait tous les ans, à Djerba, l’esprit et l’espoir d’un monde nouveau !