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- 29/09/2025 à 09:23
Ecole, conversation et problèmes de société

Par Mansour M’henni
La juste réparation des choses n’est peut-être pas forcément un acte de violence répressive qui ne tienne pas compte des conditions inhérentes à tout acte, hier jugé comme bénéfique et aujourd’hui estimé comme « infractaire ». Tel me paraît être le fond de toute pédagogie, surtout celle de l’école et celle de la société.
En effet, en ce moment où nous revivons les heurts et les bonheurs des rentrées scolaires et universitaires, le moindre écho ou le plus petit spectacle des frictions relationnelles nous relance dans des débats de sourds où de prétendus prophètes se dressent droit devant toute vision différente de la leur pour la condamner à la poubelle de l’irrationnel.
On l’a vu récemment dans l’incident de la prière collective dans la cour d’une école, une situation qui a mobilisé beaucoup d’énergie et qu’il est difficile de prendre pour un acte spontané. Sans doute découvrira-t-on les vraies intentions des provocateurs qui cherchent à déstabiliser une société tunisienne dont la modernité dérange certains modèles rétrogrades. Pour l’heure, il est peut-être plus rationnel de maintenir l’établissement scolaire dans le statut qui est normalement le sien, celui de l’initiation à l’intelligence libre et à la relativisation des vérités dans l’opération même de la quête ininterrompue de la vérité. Cela peut intégrer des conversations sereines à propos de ces questions conflictuelles, mais cela ne saurait tolérer une quelconque violence s’activant à paraître dans le rôle du commandeur de la pensée générale.
Non loin de l’esprit de l’école, et au centre de l’édification sociétale, se pose et s’impose la question de l’environnement, notamment du point de vue de la protection du littoral. Dernièrement, les feux de l’actualité se sont fixés sur le littoral du golfe de Monastir, une région criminellement polluée au point de voir échouer au bord de l’eau de grandes quantités de poissons morts, déclenchant ainsi la sonnette d’alarme de tous les dangers et changeant la couleur même de la mer. La science et la conscience se sont appliquées alors à rassurer, autant que possible, la population catastrophée, et certaines agences se sont mises à l’œuvre pour faire état de leurs interventions, d’une façon jugée maladroite par plusieurs citoyens. A preuve, la situation conflictuelle provoquée au sud du port de Sayada.
Cette ville semble étouffer dans les limites de son secteur officiel de plus en plus rétréci par le développement et la gestion des frontières communales. Comme certaines villes du golf, dont l’aménagement et la protection sont programmés depuis plusieurs années, Sayada n’aurait pas trouvé d’autres moyens de répondre aux besoins urgents d’espaces vitaux que d’étendre son domaine urbain à la surface de la mer, repoussée à ses plus forts retraits. Cette dynamique « expantionniste » est d’ailleurs de bien petite dimension comparée à celle d’autres villes voisines. Certes, cela ne s’est pas fait sans conflit ni sans compromis ; mais aujourd’hui des établissements de tous genres sont installés sur ces terres conquises, ravies à la surface aquatique. Il semble même que cette opération ait été insérée au programme du projet d’aménagement du littoral en question. Ainsi, des espaces de commerces variés et de plaisance y fonctionnent déjà depuis des années.
Or, la goutte qui a semblé déborder le verre de la colère, c’est la menace adressée au président du club de tennis à Sayada et au Secrétaire général de sa municipalité, de par son statut de gestionnaire de la présidence municipale en l’absence d’un conseil municipal ému. Le premier serait menacé d’emprisonnement pour avoir aménagé un terrain de Tunis sur les nouvelles terres du littoral ; et le second pour avoir permis l’installation d’un terrain d’handball pour l’entrainement des jeunes à proximité de la salle couverte (Sayada est historiquement une ville importante de la promotion de ce sport dans la région). Ces lieux sont fonctionnels depuis des années et ne sauraient être l’œuvre d’un président de jeune club de tennis, ni même d’un secrétaire de municipalité, fût-il général.
Ainsi, si problème il y a et qu’il faille en gérer les effets et les causes, c’est en réunissant tous les concernés autour d’une table de conversation intelligente et constructive pour aboutir à un accord aussi consensuel que possible et pour initier la citoyenneté à l’école de la conversation et du partage des responsabilités. Le bras-de-fer ne saurait être de mise dans la gestion des affaires publiques que dans des situations extrêmes parce qu’il ne pourrait que mettre la pression en faisant preuve d’incompréhension.