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  • 21/04/2016 à 15:17

France: le mouvement Nuit Debout …!

France: le mouvement Nuit Debout …!

Pr. Khalifa Chater

Le mouvement Nuit Debout, lancé par le collectif convergence des luttes, le 31 mars 2016, propose  "la reconquête du débat démocratique" et "la repolitisation de l'espace public", en France. Réunis chaque soir sur la place de la République,

des militants tous azimuts, prennent librement position sur les questions de l'heure et les visions d'avenir. Déclaration de Camille, prénom générique sauvegardant l'anonymat, et pilier du mouvement déclare : ‘‘Nous, on fixe un cadre, des assemblées populaires. Après, libre à chacun d'avoir ses idées’’ Elle reconnait  ‘‘l'impossibilité de tout contrôler et de tout unifier, dans cette nébuleuse, où il y a plusieurs opinions ‘‘ (enquête de Delphine de Mallevoue et Paule Gonzales, "la très courte Nuit Debout, d'Alain Finkielkraut", le Figaro, 18 avril, 2016).

Mutation du discours depuis lors, radicalisation des positions, et organisation plus formelle par une division du travail, entre les assemblées et une demie douzaine de commissions, le mouvement  affirme désormais la rupture avec l'ordre politique.‘‘On ressentait tous le même malaise, un mal être inouï, devant un système économique absurde, injuste, opprimant et une classe politique totalement déconnectée de nos vies. Et voilà, qu'on se reconnaît, qu'on se parle, qu'on ose dire tous ensemble : ça suffit! Y en a marre ! Remettons tout à plat ‘‘ (enquête Gojean, "Nuit Debout, voilà qu'on se parle…", Le Monde, 5 avril 2016). Les slogans expriment désormais des utopies : ‘‘le monde ou rien‘‘ ou même ‘‘ni loi, ni travail‘‘. Au-delà de ces revendications formelles, on dénonce "la vie précaire modulable, ou d'autoentrepreneur à perte". Conséquence de ce diagnostic, Nuits Debout, rédige  une constitution de la république sociale et  prépare une université populaire (François Gusset, "le début d'une longue veillée", Le Monde, 8 avril 2006). La contestation de la loi du code El-Khomri, annoncée le 18 février, cause originelle du déclanchement de la contestation Nuit Debout est désormais transgressée? Le mouvement  a réalisé une jonction des travailleurs et des non-travailleurs (étudiants ou chômeurs). Il suscite désormais la crainte du gouvernement, sans atteindre pour le moment, l'envergure du mouvement de mai. Mais qui pourrait évaluer le résultat final du processus, dynamisé par une escalade.

Fait significatif, le philosophe et académicien Alain Finkielkraut a été écarté de la fraternisation révolutionnaire. Venu sur place, samedi 16 avril, "pour écouter et non intervenir", afin de se faire une idée, "sans le filtre des médias", il a été prié de partir. Par contre, Yanis Varoufakis, ancien ministre grec des finances et homme de gauche a bénéficié d'un accueil chaleureux. Explication d'un militant : ‘‘Nuit  Debout est le symptôme d'un rejet, d'une défiance du système politique médiatique … Qu'il le veuille ou non, Finkielkraut incarne ce système. Or, à la République, les citoyens se réapproprient et leur place et la parole‘‘.  

Dans l'état actuel des choses, le mouvement se développe dans les villes et les banlieues. D'autre part, la contestation populaire vit la coexistence de deux courants différents: ceux qui privilégient la lutte sociale  et  les démocrates qui veulent libérer la parole.  Le compromis pourrait-il intégrer les deux courants pour définir un projet collectif ? D'autre part, quel serait l'avenir d'un mouvement contestataire marginal, par rapport à la pesanteur du système politique français et aux solides assises de sa classe politique ? 

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