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  • 12/09/2018 à 09:08

J’ai mal à l’humanité

J’ai mal à l’humanité
Par Mansour M’henni 

« J’ai mal à l’humanité ». Je ne sais de quelle manière, pendant ma scolarité, j’avais retenu l’idée que cette citation était de Jean-Paul Sartre. Je crois même l’avoir ainsi citée dans certains de mes articles ; mais je ne l’ai jamais retrouvée, ainsi formulée, chez le père de l’existentialisme. Cela ne l’a pas empêchée d’être ainsi reprise, sans référence, et même d’avoir généré des formules semblables du genre : « J’ai honte à l’humanité » ; « J’ai honte pour notre humanité » ; « J’ai honte pour notre République » ; etc. Oh combien actuelles sont toutes ces formules, dans notre monde actuel, quelles que soient les dimensions que chacun donnerait à son monde !

« J’ai mal à l’humanité ». Je recours de nouveau à cette formule pour dire l’extrême horripilation qui me prend chaque fois que me parviennent ces informations de crimes insoutenables, de plus en plus nombreux, commis contre des enfants. Je ne sais s’il est permis, à ce propos, de distinguer les violences traditionnellement classées de droit commun (viols, séquestrations, agressions caractérisées, etc.), et les violences catégorisables (même si elles ne sont pas toujours ainsi catégorisées) comme « des crimes contre l’humanité ». D’ailleurs, si distinction il y a, où mettre l’exploitation des mineurs dans les réseaux de mendicité et de prostitution qu’on croirait sur le point d’obtenir des patentes officielles, tellement elles ont pignon sur rue. Et je ne parle pas seulement de notre pays.

On apprend, par l’UNICEF, que « dans la région d’Idlib au nord-ouest de la Syrie, les forces en conflit s’apprêtent à livrer de violents combats. 

Plus d’un million d’enfants, réfugiés dans cette région avec leur famille pour fuir l'horreur de la guerre, se retrouvent pris au piège, à nouveau en danger de mort par l’imminence des bombardements et la violence des combats, obligés de s’abriter dans des campements surpeuplés, où la nourriture, l’eau et les médicaments sont en quantité dramatiquement faibles ». Cela nous rappelle tous les enfants morts, et pas en Syrie seulement !

Oui, le Yémen, parlons-en ! Il y a un mois, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) signale « au moins 29 enfants tués dans une attaque qui a visé un bus dans le nord du Yémen» et au moins trente autres blessés, sans parler des adultes. Car la guerre du Yémen a fait plus de 10 000 morts depuis mars 2015. L’Unicef alarme le monde, la commission des Etats Unis pour le Yémen crie au scandale et le chef de l'ONG Care International Wolfgang Jamann évoque « une honte pour l’humanité ». Il y a sans doute pas à chercher les responsables ; mais il y a vraiment de quoi avoir honte !

Partout ailleurs dans le monde, c’est l’enfance qui pâtit des folies des « Messieurs qu’on nomme Grands ». En voici un autre exemple dans cette citation : « Le silence coupable de la communauté  internationale face à ce qui se passe en Birmanie est ahurissant. Le seul tort des Royinhgas persécutés,  tués,  brûlés et enterrés vivants, est d’être musulman. Et pourtant, la Ummah islamique dans sa quasi-totalité, se montre indifférente à cette écœurante situation. L’ONU, l’OCI, l’humanité de manière générale se couvre d’ignominie et devient complice en adoptant cette posture de spectateur… ».

Moins importantes paraîtraient les violences de toutes sortes subies par des enfants individuellement ? En fait non, toutes les violences infligées aux enfants sont de même nature… que les meurtres dont ils sont l’objet de façon collective. Et tout cela nous donne mal à notre humanité. Le silence de neutralité ou de timide compassion nous caractérise pour la majorité. D’autres s’expriment comme ils peuvent, souvent sans nul effet. Mais ils auront au moins parlé.

Ainsi dit une mère à sa fille : « J'ai mal à mon humanité. J'ai mal de voir la violence que peut abriter un être humain. J'ai mal d'avoir l'impression que je devrai subir tout ça, que tu devras subir tout ça. Pis ça me choque, parce que moi, je veux juste la paix. Parce que moi, j'ai jamais souhaité de mal à mon voisin, moi j'ai toujours fait ce qu'il faut, du mieux que je peux, parce que c'est comme ça, juste ça. J'ai peur de trouver ça banal, de m'habituer parce que c'est normal de voir ça aux nouvelles, parce que c'est normal que ça arrive ailleurs, parce que ce sera normal que ça arrive maintenant chez nous. »

Une autre femme écrit, comme en écho : « J’ai mal à mon Humanité et je revendique mon humanité. Mais je reconnais et je revendique aussi ma part lumineuse, celle qui contient cette si petite parcelle d’humanité et qui lui chuchote à l’oreille de se réveiller et de se souvenir
de qui elle est… »

Tout est là donc : « J’ai mal à mon Humanité et je revendique mon humanité ». Reste à voir de près cette revendication.

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