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- 06/06/2015 à 11:19
L'enjeu syrien

A juste titre, la communauté internationale a exprimé sa crainte de voir les trésors de l'humanité qu'elle contient, objet de destruction des envahisseurs. Du point de vue géostratégique, la prise de ce carrefour routier, offre à Daeche une continuité géographique avec la province irakienne d'al-Anbar. Palmyre ouvre le grand désert, frontalier de l'Irak. Daeche contrôle désormais plus de 95000km2, soit 50% du territoire syrien. Il est désormais maître de la quasi-totalité des champs pétroliers et gaziers de la Syrie, après la prise de deux champs gaziers, prés de Palmyre.
Le repli du régime Assad est évident. Outre le réduit alaouite, le pouvoir domine, plus ou moins, l'axe Hama-Homs. Il contrôle désormais une mini "Syrie" utile. Le pole de la résistance sunnite s'étend sur la région Ouest d'Alep. Ce rassemblement d'opposants est dominé par le Front an-Nosra, la branche locale d'al-Kaida, les salafites d'Ahrar ach-Cham et d'anciens de l'armée syrienne libre. Ces coalisés s'opposent bien entendu à Daeche. Dans une Syrie désormais fragmentée, éclatée, la mosaïque géopolitique comprend essentiellement ces entités : une conclave fondamentaliste, dominée an-Nosra, à l'ouest d'Alep, une région kurde, à l'est, à la frontière turque et une Syrie loyaliste, au centre et sur la cote et le territoire de Daeche, en expansion de Palmyre et le désert, vers la frontière irakienne.
Fait évident, les forces en guerre, sont des relais des principaux acteurs de la guerre régionale. "La Syrie est un pivot géopolitique régional à l’intersection de complexes jeux de pouvoir" (Jean-Sylvestre Mongrenier, " la Syrie dans l’équation géopolitique régionale", http://www.institut-thomas-more.org, 4 juillet 2011). Le "printemps arabe" et l'insurrection contre le régime d'al-Assad, qui s'en suivit, établit des alliances : L'Iran et la Russie soutiennent le pouvoir, alors que les pays du Golfe et la Turquie appuient la résistance. D'autre part, la coalition occidentale, dirigée par les USA, bombarde Daeche, en Irak et en Syrie. De fait, l'intervention américaine n'a pas réussi à arrêter l'escalade. Daeche "a toujours les moyens de conduire des opérations offensives majeures" (diagnostic du général Laure Mandeville, entretien Le Monde, 22 mai 2015). Constatant cet échec, Jessika Lewis appelle à la mise en place d'une stratégie globale américaine, pour restaurer la souveraineté de la Syrie. Le général Laure Mandeville rejoint ses vues et estime qu'une telle stratégie nécessite de convaincre les Russes et les sunnites (Ibid.) En attendant, le risque d'implosion de la Syrie est bien réel. Constat de certains observateurs avertis, prenant en compte les avancées spectaculaires de Daeche, la capitale, à 200km prés de Palmyre est désormais menacée. Les acteurs devraient bientôt faire face à la bataille de Damas, entre les loyalistes et Daeche, éclipsant totalement les dites coalitions de modérés. Pessimiste, le journal Figaro s'interroge "Daeche à Bagdad et Damas ?" (Éditorial, 20 mai 2015). Les acteurs du Moyen-Orient devraient lever les ambigüités de leurs alliances, devant cette triste perspective.