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  • 18/07/2017 à 09:31

Le militantisme ayant pour mobile « Après moi le déluge ! »

Le militantisme ayant pour mobile « Après moi le déluge ! »

Par Mansour M’henni 

Dernièrement, j’ai eu à me rendre au ministère de l’Education pour une question personnelle et pour entrer,  j’ai eu à traverser une petite foule de jeunes qui tambourinaient sur de la ferraille ou qui claquaient des bouteilles en plastic vides pour faire plus de tapage. 

Tous criaient, à voix inégales : « Emploi, liberté, dignité nationale ».

J’ai eu donc au fond de moi un sentiment de compassion, en pensant que ces jeunes diplômés pouvaient ne pas avoir de quoi manger et chercher à se débrouiller leur argent de poche de la façon qui blesserait leur dignité et écorcherait leur amour propre.

Arrivé au bureau où je devais voir traiter mon affaire, je n’ai pas manqué d’interroger la personne qui m’avait accueilli avec respect et conscience professionnelle, renforçant encore en moi ma ferme conviction que, malgré certaines exceptions, l’administration tunisienne reste un pilier central de notre Etat et de notre édifice sociétal. Là, j’ai appris que le tapage diurne durait depuis une semaine au moins pour faire l’effet d’un vrai casse-tête sur « les fonctions du ministère qui n’ont rien à voir ni à faire dans les doléances des protestataires et qui continuent de travailler malgré les vacances et la chaleur pour ne pas laisser trainer les dossiers et les affaires des citoyens. D’ailleurs, même au plus haut de l’échelle, que peut faire pour eux un ministre intérimaire ? Qu’ils reviennent après le remaniement s’ils veulent !  ».

D’évidence, c’est des propos que l’on peut entendre différemment ; mais ils prennent une autre valeur quand on écoute le reste des données concernant les manifestants qui n’auraient rien à voir avec la situation piteuse supposée au premier abord, celle de « ces jeunes diplômés pouvant ne pas avoir de quoi manger et chercher à se débrouiller leur argent de poche de la façon qui blesserait leur dignité et écorcherait leur amour propre ».

En fait la situation concerne un millier de personnes même si les manifestants sont au nombre d’une vingtaine, mobilisés, paraît-il, par un appel sur facebook. Du temps où M. Taïeb Baccouche était ministre de l’Education, il les avait fait profiter d’un contrat d’enseignement. Puis une offre est survenue de l’émirat d’Oman appelant à un recrutement d’enseignants tunisiens, fonctionnaires publics ou non, titulaires ou non. On imagine alors l’engouement de ces jeunes optant systématiquement pour cette offre sans nul souci des procédures légales du recrutement régulier et de l’appartenance permanente à la fonction publique – ce qui se comprend bien par ailleurs.

« Depuis, nous précise-t-on, ils ont donc profité du salaire juteux qu’ils reçoivent dans le golfe, un salaire chichement conforté par une dévaluation régulière du dinar tunisien. Pensons à des jeunes animés par le sens entrepreneurial et l’esprit d’initiative, n’auraient-ils pas eu, en plus de cinq ans de conditions très favorables, de quoi lancer des projets personnels ou associés et faire ainsi travailler une bonne partie de leurs concitoyens congénères qui n’avaient pas eu la même opportunité qu’eux ?! Les voilà donc aujourd’hui à vouloir prendre, égoïstement, le beurre et l’argent du beurre, sans nul sentiment de solidarité à l’égard de leurs semblables d’hier ! On les aurait imaginés venir protester pour réclamer le recrutement de ces camarades restés chômeurs ! On aurait compris s’ils étaient venus demander soutien à des projets, par eux proposés, pour faciliter l’emploi et améliorer les conditions de ces camarades ! Ils auraient ainsi fait preuve de citoyenneté positive, tout aussi impliquée dans l’amélioration des conditions personnelles que dotée d’engagement responsable pour trouver, avec les Etat et même sans l’Etat, des solutions favorables à tous les concitoyens de conditions précaires ! »

Que répondre à de tels commentaires ? Chacun a sans doute sa façon de le faire ; mail il nous revient à tous d’en converser en toute sérénité, si nous voulons penser l’avenir de notre société en termes de travail partagé, de participation solidaire et de démocratie du respect. 

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