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  • 08/02/2019 à 09:41

L’Enfance qui nous accuse

L’Enfance qui nous accuse

Par Mansour M’henni

Pendant que tous les débats ou presque tournent autour du dernier scandale de ladite « Ecole coranique de Regab », tous les enfants ou presque sont partout à marcher indolemment dans leur petit univers de vie, qui est la matrice de toute vie et peut-être de tout univers.

 Ils paraissent insensibles à ce qui les entoure : ces accusations réciproques, cette exacerbation exhibitionniste, bref tout le cinéma qui accompagne chacune de nos anomalies quand celles-ci viennent nous éclater à la figure, comme la gifle d’un maître sévère et intolérant.

C’est l’innocence enfantine qui vient réveiller en nous des sentiments perdus et peut-être d’autres sentiments non encore connus. Elle vient aujourd’hui nous montrer du doigt de l’accusation et prononcer un verdict de culpabilité indéfendable, preuves à l’appui… Et la « Maison close » de Regab n’est qu’un échantillon des preuves, aussi nombreuses qu’implacables, de notre non assistance à enfance en danger, par inconscience, par indifférence, par complaisance ou par complicité.

Certains responsables des enfants – c'est-à-dire la société entière et d’abord les parents et « les éducateurs » -- semblent totalement insensibles, ou presque, à l’idée que tout, dans la vie d’un enfant, sert à quelque chose, même les faits et gestes les plus anodins, en apparence, et les incidents les plus divers quel qu’en soit l’effet constaté ou non.

Quant à ceux qui se sont donné pour tâche d’exploiter et d’instrumentaliser les enfants, pour différents usages criminellement inhumains, savent bien l’importance des stratégies de manipulation de l’enfance et sa fraîcheur pour leur commerce de la terreur et leurs complots contre le noble rêve humain d’une société saine. Ces soldats des ténèbres le savent de ce savoir prophétique et on ne peut plus cynique dont M. Abdelfettah Mourou a étalé l’efficacité devant un certain Wajdi Dhnim, en 2012. L’actuel vice-président de l’ARP a beau chercher à se défendre de ses propos trop explicites pour laisser place à une interprétation biaisée, sa dernière apparition sur le plateau de Mekki Helal dans la Première Chaîne nationale n’a fait que dévoiler encore une fois sa sophistique rhétorique et oratoire pour défendre l’indéfendable. Un mea culpa, franc et sans détours, suivi d’excuses, l’aurait mieux servi.

Bref, aujourd’hui, l’innocence enfantine nous fait assumer la responsabilité du destin de l’enfant, sans nous donner le droit ni l’autorisation d’en disposer à notre façon et selon nos convictions. Rien de plus néfaste que de chercher à couler la personnalité de l’enfant dans un moule préétabli et imposé comme un modèle inaliénable. Un enfant doit évoluer dans un monde ouvert, propice à l’intelligence libre et à la création spontanée, pour qu’il assume lui-même la responsabilité de son destin. Quand on lui apprend sa culture, au sens large qui intègre tous les secteurs, c’est pour lui donner le sens d’une implication innovante en adéquation avec le sens de l’Histoire.

A quelque niveau qu’elle agisse, la responsabilité citoyenne interdit d’aliéner la conscience enfantine, aux premiers pas de son éveil, en l’accablant de chaînes et d’interdits et en lui barrant la voie vers tout élan d’auto-construction de soi, au croisement de ses acquis naturels et de ses compétences culturelles.

Là est le vrai terrain sur lequel on devrait engager toute réforme, restructuration ou même révolution du système éducatif, tous espaces et tous niveaux confondus. Là est la porte par laquelle on accèderait à un nouveau modèle de société, humain, assez humain pour nous faire mériter notre humanité.

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