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  • 29/08/2019 à 10:30

Les impressions d’un tournant électoral

Les impressions d’un tournant électoral

Par Mansour M’henni


Au terme de ce week-end démarrera la compagne électorale du premier tour de l’élection présidentielle sur fond d’agressions, parfois plus que verbales, et de remises en question touchant jusqu’au corps judiciaire qui est le principal garant de la régularité du fonctionnement de toute dynamique sociétale.

En fait la campagne a bien commencé avant même l’annonce par l’Isie de la liste provisoire, bientôt définitive, des candidats à la présidence. Un intense fourmillement médiatique a occupé l’ensemble citoyen, chacun prêchant pour sa chapelle ou pour son prêtre sans chapelle ; les moins lotis sur ce plan et de loin les plus nombreux sont encore à tâter à tous les seins pour chercher à quel saint se vouer.

Jamais sans doute les propos et les commentaires des réseaux sociaux n’ont autant usé de la figure de l’hyperbole et de son effet d’exagération. A y voir de près, on n’y trouve guère de différence à la façon de dire et de faire du temps de l’Etat autoritaire, sauf la pluralité des candidatures, et ce n’est pas peu de chose. C’est dire que l’évolution vers un processus démocratique crédible est certaine ! Le risque est de rater l’objectif par trop de méprises quant au rôle de chacun, quant aux limites de chaque entreprise, quant à la capacité de raison garder même dans la plus vive ébullition.

J’ai personnellement suivi de près cette dynamique, tout compte fait heureuse pour la démocratisation de la société, et j’ai moi-même été tenté par des prises de position, voire même un engagement, par trop rapides. Mais j’ai petit à petit rationalisé ma fougue première à la lumière des dits et des non-dits ainsi que des faits et gestes des candidats et de leurs foules de soutien.

Aujourd’hui, j’en suis à des impressions qui resteront provisoires jusqu’au jour des urnes, ce jour où je serai le seul à savoir pour qui j’aurai voté, car le vote, en tant qu’un acte libre, est un acte intime et secret. Ces impressions me permettent de partager les remarques suivantes que je rends publiques, comme une bouteille à la mer, en guise de catalyse à la conversation en société et à l’interaction positive.

Ma première impression est qu’on n’aura pas de président indépendant. Peut-être ne l’aura-t-on jamais. Sans doute est-ce pour cela que je ne tiens aucun des candidats en course pour un candidat indépendant : chacun a son lobby qui est à sa dimension et à la dimension de ce qu’on attend de lui… de ce qu’on pourra tirer de lui. Dès lors, les facteurs qui détermineront les votes des électeurs communs, ceux-là qui feront la différence, seraient à mon avis : le programme électoral et ses appuis argumentatifs, le fond éthique touché par l’électeur au-delà de toute propagande, la gestion des prestations médiatiques et la force de la personnalité du candidat.

Avant même le démarrage de la campagne électorale, des candidats portés favoris ont perdu du terrain, par trop d’improvisation et de maladresses, et, au mieux, se retrouvent maintenant au second plan. D’autres au contraire ont eu déjà l’occasion d’attirer l’attention d’électeurs qui ne les connaissaient pas assez et ont acquis auprès d’eux une certaine approbation. Je pense à quelqu’un comme Mraïhi ou Saïd El Aïdi. Plus même, « le candidat à abattre », comme disait notre confrère Brahim Oueslati pour désigner Youssef Chahed, s’affirme de plus en plus contre toutes les armes dirigées sur lui et convainc de plus en plus certains sceptiques, aidé en cela par le Secrétaire général de son parti qui a tout l’art de communiquer.

Abir Moussi gagne en sérénité sans perdre ses convictions fondamentales ni la cohérence de son discours ; elle a gardé le courage de la franchise et de la confrontation, contre l’affrontement et l’agression frontale qui marquaient ses premiers pas dans la course politique.

La grande énigme restera le coup secret que jouerait Ennahdha dans cette course. Avec au moins six candidats à sa solde, comment va-t-elle trier pour tirer son épingle du jeu ? Elle y travaille sûrement et tous les coups semblent envisageables de sa part. Quant à l’extrême gauche, on ne sait cette fois sur quel strapontin elle va se retrouver, après son éclatement spectaculaire, prévisible pourtant selon cartains connaisseurs.

Cela dit, les prochains jours apporteront sûrement de nouveaux éléments et la lecture du paysage en serait autre, dans le même ordre des impressions, jusqu’au jour des élections.

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