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  • 19/05/2015 à 10:19

Nida Tounes à l'épreuve du pouvoir

Nida Tounes à l'épreuve du pouvoir

Pr. Khalifa Chater

Formé pour constituer une alternative au parti an-Nahdha et ses alliés de la troïka, Nida Tounes a pu réaliser un rééquilibrage des forces politiques.

Prenant conscience  de la gravité des enjeux, il réalisait  que ses adversaires risquaient de raser la façon d'être des Tunisiens. Par ailleurs, un mouvement radical, qui se développait, dans les marges de la classe politique, adoptait une "subculture" périphérique, conforté par des "alim"  radicaux de l'étranger.  De fait, le projet de société tunisien était mis en péril. La soft revolution  et le dialogue national, qui l'a couronné, a rapproché les points de vue et permis l'adoption d'une constitution consensuelle. Nous pouvons actuellement constater que la classe politique a instauré une "démocratie apaisée", où le jeu politique transgresse les démarcations identitaires. La victoire électorale de Nida Tounes, lors des élections parlementaires et présidentielles a mis à l'épreuve ses différentes composantes politiques. La démission de Béji Caïd Essebsi du parti, suite à son accès à la présidence, priva Nida Tounes de ses capacités d'arbitrage.  Nida Tounes aurait été "incapable de digérer ses victoires aux législatives d’octobre et à la présidentielle de décembre 2014" (Samy Ghorbal, " Nida Tounes : Mohsen Marzouk, à quitte ou double", in Jeune Afrique, 14 mai 2015).

Sans présidence effective, Nida Tounes est devenu rapidement un bateau ivre, perturbé par "une guerre de tranchées", entre des clans. Occultant sa gestion nationale, régionale et locale, le parti risquait l'implosion. Le subterfuge de l'abandon du cumul des mandats devait remettre la concurrence des chefs à l'ordre du jour. De fait, le conflit sous-jacent opposait des frondeurs, à l'Establishment fondateur. Ils tentaient d'induire une nouvelle légitimité, sinon une allégeance.

Retour au consensus, le bureau politique de Nida Tounes a entériné le  mercredi 13 mai, la démission de Taieb Baccouche du poste de secrétaire général et son remplacement par Mohsen Marzouk, qui devait quitter sa charge de conseiller spécial auprès du Président. Mohamed Ennaceur, cumulera, jusqu'à nouvelle ordre, la présidence du Parlement, et celle de Nida Tounes Taieb Baccouche, Faouzi Elloumi et  Hafedh Caïd Essebsi, sont nommés vice-présidents. Un nouveau porte-parole sera bientôt désigné. Cette équipe pourrait-elle reconstruire le consensus, remettre le parti en marche et œuvrer pour dynamiser l'action gouvernementale ? Les observateurs préféreraient évoquer des rivalités, plutôt qu'une connivence. Les dirigeants disposent de réseaux d'influence, qu'ils peuvent mobiliser, lors du prochain congrès et des différentes campagnes électorales. Ecoutons les lanceurs d'alertes.

Ne perdons pas de vue, d'autre part, la dichotomie entre les dirigeants et la base ou du moins le décalage entre eux. Pour la majorité, seul le présent compte, c'est-à-dire le traitement des problèmes du quotidien : chômage, précarité, pouvoir d'achat. Ne sous-estimons pas les rappels à l'ordre des citoyens à leurs dirigeants. Le relooking de Nida Tounes ne suffirait pas. Les inquiétudes populaires sont légitimes. Elles ne peuvent s'accommoder  d'une certaine accoutumance du pouvoir ou du moins de ses pauses de réflexion. Il faudrait recadrer le gouvernement, par les partis au pouvoir, afin que les attentes deviennent des priorités.

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