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  • 27/10/2016 à 10:08

Quand la Destourianité devient objet de dispute

Quand la Destourianité devient objet de dispute

Par Mansour M’henni

On n’a pas arrêté d’entendre parler du rassemblement de la famille destourienne après son démantèlement caractérisé des suites du changement politique en 2011 et surtout de la dissolution du parti qui faisait sa puissance et son apparente cohésion. 

Cependant, chaque fois que cette famille se met en spectacle, c’est le constat bien malheureux d’une multitude de dissidences et de divergences empêchant ces morceaux épars de retrouver ne serait-ce qu’un semblant de cohérence pouvant amener l’espoir d’un rassemblement futur. D’ailleurs la dernière émission de télévision sur Hannibal TV, consacrée à la famille destourienne, a été très instructive, à plusieurs égards.

Précisons qu’une rumeur avait précédé l’émission faisant état d’une réunion confidentielle entre les chefs de trois partis se reconnaissant, à des nuances près, de l’assise idéologique destourienne, en l’occurrence le parti Al-Moubadara Al Watania, Le Parti Destourien Libre (héritier du Mouvement Destourien) et Al Machrouu. On rapportait alors que les grandes lignes de conduite du projet de « rassemblement » étaient arrêtées ou presque et on pensait que l’émission de HannibalTV allait avoir la primauté de l’annonce et du développement de cette nouvelle démarche « unioniste ». Hélas, on n’a encore eu que le spectacle de petits acteurs, la plupart de second rang, se disputant de tout et de rien, se prévalant chacun, pour soi ou pour une autre personne, d’un fallacieux héroïsme passé de mode ou d’un surplus de légitimité à ressusciter et à conduire la « nouvelle destourianité ».

Les spectateurs de la chaîne ont donc eu droit à une vraie pièce théâtrale du genre vaudeville, où il était de bonne politique de s’amuser et de se divertir que de s’alourdir de la cacophonie de discours faussement politiques. Et comme il y avait beaucoup trop de professionnels du droit pour faire valoir clairement certains droits, on a eu droit à des plaidoiries étirées et répétitives, remplies de rhétorique et inondées de salive, comme s’il s’agissait de passer un concours oral pour la profession d’avocat.

Du coup, la grande question qui « chiffonne » vraiment certains observateurs est de savoir si ces partis avaient bel et bien inscrit cette émission-TV dans leurs stratégies communicatives respectives ou si, comme d’autres auparavant, ils se laissaient plutôt conduire par certains médias dans des pièges qui les rabaissent chaque jour davantage, en donnant l’illusion de servir l’audimat des entreprises médiatiques.

Il y a certes un cas à part, celui de Abir Moussi qui paraît décider seule, à sa guise et pour elle, prenant sur elle seule, toujours seule, de conduire le combat médiatique de SON parti, après qu’elle l’avait hérité d’un père spirituel tardivement autoproclamé seul vrai leader des destouriens. N’est-il pas temps, pour Madame, s’il est vrai qu’elle décide, sans d’autres forces tirant subrepticement les ficelles, de passer outre le malheureux incident de 2011 au tribunal et de monter son nouveau rôle sur une nouvelle logique politique perspectiviste, claire et rationnellement établie ?

Mais l’on se demande, d’un autre côté, s’il n’y avait à Al-Moubadara qu’une personne mal assise sur la logique et l’articulation du discours pour « porter sa parole » et conduire sa stratégie communicative. Franchement, son porte-parole était en mauvaise posture entre plusieurs rôles contradictoires et mal articulés : d’abord défendre son chef et son parti, rassemblés dans la même entité ou presque, contre la férocité mielleuse de Mme Moussi, ensuite faire valoir l’apport concret de ce parti, le seul à représenter les destouriens à l’ARP, enfin paraître assez conciliant et ouvert, malgré les divergences, pour un avenir à négocier (sans doute en rapport, d’abord, au repositionnement des personnes).

Dans tout cela, c’est la présence d’Al–Machrouu qui est la plus étonnante et peut-être la plus suspecte. Il s’est certes reconnu de la pensée réformiste de la Tunisie, donc d’une certaine « bourguibianité » qui n’a rien à voir avec tout bourguibisme conditionné ou inconditionnel. Mais son représentant sur le plateau d’Hannibal TV a fait cavalier seul et a raconté ses errements entre plusieurs partis dont Al-Machrouu est l’escale actuelle, ce qui laisse supposer qu’elle n’est pas forcément la dernière. Tant mieux sans doute pour la personne, mais rien de forcément heureux pour le parti de Marzouk apparaissant comme davantage un choix d’ultime désespoir qu’un choix de conviction et de prospection.

Finalement, essayons de positiver un peu et voyons dans cette émission, à mille autres pareilles, l’indice d’un débat politique qui s’est libéré sans doute mais qui n’a encore trouvé ni ses règles ni ses objectifs, encore moins ses arguments et attendons des jours meilleurs. Pourvu qu’il ne soit pas alors trop tard ! 
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