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  • 22/06/2018 à 13:07

Que cache le conflit Tabboubi-Chahed ?

Que cache le conflit Tabboubi-Chahed ?

Par Mansour M’henni

Le débat continue dans la société tunisienne et c’est tant mieux, tant qu’il ne tourne pas au combat !

Deux questions majeures semblent retenir l’attention des intéressés par la politique, ou même ceux qui sont soucieux du sort de la Tunisie de par leur statut de citoyenneté impliquée : la question de la remise en question du gouvernement (autant dire, sans hypocrisie, « du président du gouvernement ») et la question du rapport de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (Colibe), rendu public le 12 juin en cours sur le site officiel de ladite commission.

Il faut reconnaître, dès l’abord, que l’importance cruciale des deux questions n’empêche pas de les hiérarchiser en fonction des motivations des acteurs qui les conduisent, en rapport à l’intérêt supérieur de la patrie. De ce point de vue, force est de constater que le débat autour du gouvernement a bien tourné en combat visant le président du gouvernement Youssef Chahed, presque même en un bras de fer entre lui et Noureddine Tabboubi, secrétaire général de l’UGTT, la principale formation syndicale (et non l’unique, depuis 2011). En arrière-fond, mais en implication directe, d’une part le petit conflit qui ne cesse de s’amplifier entre Hafedh Caïd Essebsi et Youssef Chahed, d’autre part la « guerre de positions » entre les deux partis majoritaires, en l’occurrence Ennahdha et Nidaa Tounès, aujourd’hui alliés et/ou partenaires, demain forcément adversaires dans une course électorale de grand enjeu.

Il serait inutile de s’attarder sur le chassé-croisé, tantôt de consonance tantôt de dissonance, entre  le Nidaa et Ennahdha qui, bien que perdant, chacun, une part importante de sa masse électorale lors des dernières municipales, n’ont pas vu ces voix perdues profiter aux autres partis, tous restés petits malgré les tonitruants bruits et les harangues criardes de la plupart d’entre eux. Ce qui fait que l’un et l’autre partis gardent l’espoir de récupérer ces voix, les moyens et les outils aidant, pendant que les autres continuent de nourrir l’espoir de les leur ravir, la société civile et le tissu aidant, inconscients qu’ils sont, semble-t-il, de la différence fondamentale, désormais évidente dans notre pays, entre la lutte civile et l’exercice de la politique politicienne.

Pour continuer encore la question des partis politiques, soulignons que Nidaa Tounès semble entamer une nouvelle stratégie, « d’épuration » disent certains sans doute trop crédules, une stratégie qui rappellerait en fait un certain congrès d’Ennahdha où le mouvement avait mis en veilleuse certaines de ses figures, pour des raisons de « mise en civilité de leur parti politique », sans jamais remettre en question leurs manigances et leurs provocations poursuivies latéralement. N’empêche que le caractère franchement civil de Nidaa Tounès peut constituer une chance pour lui de se renouveler à la fois par un retour aux principes de base de sa création (à ne pas confondre avec le retour de tous ses anciens dirigeants) et par une mise en pertinence des choix et des objectifs qui feraient son renouveau. Pour ce faire, un vrai jeu de démocratie interne devrait conduit franchement et sans autre légitimité que la participation pertinente et l’engagement sincère. Dès lors, la question ne serait plus celle d’un nom ou d’un autre, mais d’une pensée traçant les chemins des réalisations.

Reste maintenant le duel Tabboubi-Chahed. Le SG de l’UGTT ne peut plus convaincre, même au sein de la base syndicale, de la nature altruiste de son combat, autant dire sa guerre acharnée contre le second. Il devient évident qu’il a son agenda, non exprimé, ses motivations camouflées et sa stratégie malicieuse, vicieuse même par certains aspects, comme sa dernière alliance avec le Nidaa de HCE (parce qu’il y en a d’autres désormais), qu’il accusait, il n’y a pas longtemps, et au profit du même Chahed, de tous les torts causés au pays de connivence avec Ennahdha.

Peut-être Tabboubi a-t-il dévoilé un brin de ses intentions et de ses motivations au Président de la République, dans sa dernière audience avec lui, une audience suite à laquelle des rumeurs, supposées de sources proches ( ?), ont circulé faisant état d’un accord conclu pour l’évacuation de Y. Chahed et de son remplacement par Fadhel Abdelkefi, et sur proposition de l’UGTT s’il vous plaît ! Cela n’a pas manqué de générer d’autres rumeurs sur le lien de parenté entre le nouveau candidat et la famille présidentielle et sur l’irrévocabilité de cette option, si bien que le prochain président du gouvernement choisi serait en train de constituer son équipe !

Se méprendrait qui croirait que Béji Caïd Essebsi est né de la dernière étoile ! En tout cas, pour faire court, sans doute devrait-on accorder un certain crédit aux démarches tendant à rapprocher les vues ( ?) de Tabboubi et Chahed pour les réunir et les inviter à conclure un accord permettant de dépasser l’état de crise actuel. Reste à savoir ce que l’UGTT, Ennahdha et Nidaa tireraient, chacun, d’un tel accord !

En attendant, notre prochaine chronique prendra pour objet le deuxième point annoncé ci-dessus, celui du rapport de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (Colibe), autrement problématique, mais initiateur d’une importante logique de société.

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