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- 14/01/2016 à 16:03
Régime tunisien, l'équation politique

Pr. Khalifa Chater
Au-delà de sa commémoration rituelle, le cinquième anniversaire de la "révolution" a suscité des débats, des interrogations et des velléités de redéfinition. Nous assistons, depuis les élections de 2014, en effet, à une restructuration, révisant l'équation politique tunisienne. Le conflit identitaire et la bipolarité géopolitique mis en œuvre, depuis les élections de l'Assemblée constituante, en 2011, ont été transgressés par l'institution du dialogue et la construction d'un consensus. Le nouveau consensus historique : Les "sit in de départ", de l'été 2013 et l'engagement du dialogue national, traduisent l'émergence et le développement d'un "nouveau bloc historique". Conséquence de l'affirmation d'une volonté collective, le gouvernement de la troïka dut démissionner. Retour à la case départ, son souci d'instituer une alternative au "régime plutôt bourguibien" et son programme de révision culturelle - une réaction culturelle, selon ses adversaires - ont été abandonnés. Le nouveau consensus fait valoir la défense des acquis, l'égalité hommes –femmes, le régime civil, la tolérance, dans le cadre d'une certaine vision de l'ordre et de la justice. La Constitution tunisienne de consensus, corrigeant le projet inégalitaire du1er juin, défendu unilatéralement par la troïka, consacra ses principes. Préparées par le gouvernement indépendant de Mehdi Jomaa, les élections de 2014, assuraient un rééquilibrage des forces politiques. La formation gouvernementale fut le produit du nouveau consensus historique. La nouvelle équation politique : Nida Tounes pactisa avec Nahdha, pour rechercher une unité plus large, capable de conjurer le danger du radicalisme pseudo- religieux ou idéologique. La nouvelle coalition au pouvoir n'est pas fondée sur des choix politiques, des bases orgasitionnelles et pis encore, une même culture idéologique. Or, les rassemblements dans l'espace idéologique qui peuvent se constituer à la faveur de grandes crises nationales restent souvent superficiels et provisoires. Les protagonistes/partenaires restent très éloignés, dans cet espace d'affrontement par définition. En dernière analyse, on nie l'existence de différences et des principes de différentiation. Tabou de l'explicitation, le processus implique volontiers un travail de dissimulation, réel ou supposé, des termes de l'accord, un donnant/donnant, transgressant les discours fondateurs. Les adhérents estiment volontiers que la combinaison politique, nécessairement conjoncturelle, révèle que leurs partis manquent de pensées politiques vigoureuses. La crise ouverte de Nida Tounes et celle contenue d'an-Nahdha s'inscrivent dans cette velléité de remettre en cause l'équation politique du consensus. Elles ébranlent les deux partis, qui jouent le rôle d'"intellectuels collectifs", assurant leur cohésion idéologique. La nouvelle donne rappelle que l'espace idéologique se retrace dans un champ de prises de positions, en relations avec les enjeux différentiels.
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