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  • 16/11/2019 à 11:42

Trois premiers principes pour ce nouveau mandat

Trois premiers principes pour ce nouveau mandat

Par Mansour M’henni

Je suis quelque peu étonné par l’attitude de certains politiciens qui s’étonnent de l’alliance d’Ennahdha avec Kalb Tounès, autrement dit de Rached Ghannouchi et de Nabil Karoui.

Faut-il leur rappeler que depuis 2011, toutes les alliances ont été établies dans une sorte de détournement caractérisé des discours des campagnes électorales au profit de ce qui est brandi par la raison du réalisme et du pragmatisme politique.

Qu’on me permette de rappeler ce que j’avais publié ici même, le 7 octobre 2019, le lendemain des législatives, et que d’aucuns avaient trouvé irréaliste :

« Qu’on le veuille ou pas, et de quelque manière qu’on considère son cas, Nabil Karoui a eu l’intelligence politique de s’imposer, comme il a voulu et pu, à l’insu de tous les acteurs politiques nationaux par trop aveuglés par leur narcissisme et par leurs conflits respectifs. A présent, il est en tête des résultats des législatives avec Ennahdha, l’ami d’avant-hier et l’adversaire d’hier. Il est aussi un des deux candidats du second tour de la présidentielle. Il avait refusé tout compromis avant les législatives, mais les choses changeront sans doute après. Déjà, la déclaration de Rached Ghannouchi déplorant l’emprisonnement de N. Karoui est un signe.

Etant donné qu’aucun de ces deux partis n’a les moyens de composer un gouvernement stable, je me permettrais d’avancer le scénario qui me paraît le plus crédible, de par la logique politique qui consiste à tordre le coup à toute logique pour réaliser ses objectifs. Il me semble que Qalb Tounès et Ennahdha vont entrer en coalition sur la base d’un soutien d’Ennahdha à Nabil Karoui dans la présidentielle, de l’élection de Ghannouchi à la tête de l’ARP, et d’un commun accord sur un président de gouvernement de consensus, un autre « oiseau rare » à dénicher.

Fiction ou réalité ? L’avenir très proche nous le dira. »

De tout cela, seul le soutien d’Ennahdha à Karoui dans la présidentielle n’a pas eu lieu et cela se comprend aujourd’hui, le président de Kalb Tounès n’ayant ni les moyens ni les justificatifs à même de lui permettre une telle exigence, surtout que, loin des groupes d’influence, la majorité des électeurs tunisiens s’est sentie plus rassurée, plus confiante avec un président à l’image de Kaïs Saïed qu’un président ayant le profil de N. Karoui. Cela dit, tous les autres compromis restaient possibles et sont sur la voie de leur spectaculaire réalisation.

Au fond, c’est peut-être tant mieux pour la Tunisie de demain : une Tunisie réconciliée avec elle-même et avec son histoire, une Tunisie capable de combattre le séparatisme et le chauvinisme pour une mobilisation collective en faveur du développement économique et social. Malheureusement, ce que nous voyons et entendons de certains responsables et partis politiques n’est pas encore dans l’esprit de cet objectif.

Aujourd’hui, le mot d’ordre devrait porter haut et fort les principes suivants :

 1 – Il ne revient à personne aujourd’hui de se donner le droit de juger le passé, à part les historiens dans le cadre de leur spécialité, et encore moins de tirer de leurs jugements des raisons de restreindre la liberté de quiconque de leurs concitoyens ou de les considérer comme des citoyens moins méritoires que d’autres.

 2 – Il ne revient à personne, individuellement ou structurellement, de classer quiconque dans la catégorie des criminels ou des corrompus, sans une décision de la justice dûment prononcée. D’ailleurs, en terme de corruption, à bien creuser dans la vie de chacun, on découvrirait en chacun un aspect ou un autre que d’aucuns répertorieraient dans la catégorie des méfaits majeurs. Laissons donc la justice faire son travers ; Contentons-nous d’exiger et de soutenir son indépendance et recourons-y quand nous avons des soupçons assez crédibles.

 3 – Il est du devoir de toute personnalité ou structure politique de comprendre que la vraie démocratie se fonde sur les différences constructives, celles capables de se retrouver pour converser en vue d’avancer et de faire avancer la machine du progrès. Il est vraiment enfantin, irresponsable même, de poser d’emblée des interdits d’intercommunication entre des formations politiques appelées à veiller ensemble à la bonne gestion de l’Etat, cinq ans durant, dans une arrogante ambiance d’animosité et de rivalités d’une violence autrement daéchiste. Le peuple tunisien a fait son choix de ses différents représentants et de ce fait, leur impose maintenant un devoir de cohabitation et de construction commune, sans quoi leur désignation comme « représentants du peuple » ne serait pas méritée.

Commençons par ces trois lignes de conduites, nous verrons alors que des esquisses de solution se dessineront à l’horizon, pour plusieurs questions nous paraissant encore insolubles.

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